top of page
Rechercher
  • Photo du rédacteurPierre Marescaux

6

Fous-lui la paix, putain.

Fous-lui la paix.

Laisse Petit Lapin tranquille. Il est triste Petit Lapin, il arrive pas à se réjouir de sa victoire, Petit Lapin. Il sourit un peu mais il a du mal à donner le change.

Pourtant, qu’est-ce qu’il nous a mis. On avait bien fédéré contre lui, on savait qu’on ne gagnerait pas, mais il est quand même passé crème. Pas assez de débiles pour voter pour le Parti Présidentiel, trop malgré tout pour nous piquer nos voix. Mais même sans eux, on aurait perdu. 52% au premier tour pour Petit Lapin, 32% pour nous, le reste pour les crétins du Président.

Et déjà, il est là, leur chefaillon local, à lui lécher le fion.

Ils ont le même âge, Petit Lapin et lui. Lèche-Fion, il travaille à la Communauté de Communes du Val d'Icy, encore un gars placé bien habilement, bien rapidement, sans que personne ait trouvé à y redire. Et d’aller voir Petit Lapin, ce soir, pour gémir des « Avenir commun. Même génération. Opposition constructive. Grand défi. Demain. Progrès. Poumon vert. Tradition. Respect des sensibilités. Espoir pour notre jeunesse.»

Merde, t’as fait 16%, sale petit arriviste dégueulasse, c’est encore moins que ton Président. Tu crois vraiment que tu peux la ramener ? Mais Lèche-Fion, et c’est dans sa nature, est un colon. Il squatte son hôte. Il s’insinue dans sa tête. Il continue la petite entreprise de débauche commencée par son patron, il y a quatre ans. J’ai lu leur joli programme. En vrai, il s’appelle : « De la conduite molle vers un suicide collectif. » La suite d’une série hardcore, basée sur un délire de progrès, de mérite, de valeurs morales, de foi immodérée dans le destin félin de l’homme – mais non, on ne retombera pas toujours sur nos pattes.

Ceci étant, l’idée de voir Lèche-Fion sauter d’un immeuble sans parachute est plutôt plaisante.

Je suis là, dans le salon de la Mairie d’Icy, avec Miranda, avec ma mère et ma soeur, avec tous nos partisans, on sait qu’on a fait une chouette campagne et que ce résultat est presque inespéré, on sait qu’on va compter dans la politique municipale, mais je suis déjà ailleurs. Je n’y suis plus. La seule chose que j’aie en tête, c’est que j’ai envie de casser la tête de ce petit merdeux. Je veux qu’il foute la paix à Petit-Lapin. Fous-lui la paix, putain. Laisse-le, il est à nous. Je crois qu’il a compris, Petit Lapin ; qu'il a fait son chemin d'abord dans un labyrinthe aveugle et qu'il est maintenant en pleine lumière. Je crois qu’on va pouvoir faire de grandes choses avec lui. Il est à point, Petit Lapin.


Mon neveu est là, il a l’air de s’emmerder : il a six ans, il est tard, quoi de plus logique. Les grands messes électorales avec mousseux municipal et ersatz de TUC humides, c’est pas encore à son goût. Bientôt, ma sœur va le ramener dans leur appartement, elle et sa bonne vieille tête de martyre fatigué. Je sais ce qui l’attend et aborder ça avec cette gueule, ça me fait peur pour elle. Petit Lapin nous en a parlé hier : Petit Virus deviendra grand. Je sais bien que là où elle soigne, ça va être un bordel sans nom. C’est pas comme le petit hosto de campagne où ma mère a officié. A Icy, les Blancs sont bien. C’est normal, la taille du bouclard est quand même plus gérable. Moins de monde, des gens en meilleure santé, des vieux dans une proportion non-endémique : la situation la plus simple, en somme.

Mais vas-y, retourne soigner tes pauvres frères dans le 93, sœurette. Vas-y…

Et après, Nina, putain, viens à la ferme avec le petit. Ca n’a pas de sens de vivre comme tu le fais. Tu te sacrifies pour sauver des gens qui partent tous les matins dans un abattoir qu’ils construisent de leurs propres mains.

Sur la tribune, là-bas, mon Petit Lapin a encore son air tout triste... Il sert quelques mains, il fait son petit discours où il nous félicite. Il n’a rien changé à ce qui est attendu. C’est bien. Il fait comme on a dit ce matin en nous quittant. On va attendre un peu pour la Révolution. Mars, c'est trop tôt. On va se laisser une dizaine de jours avant de leur faire une bonne farce, et le 1er avril, on leur collera notre poisson au travers de la gueule. Pour organiser la blague comme il se doit, on a un espion dans le camp d’en face. Et c’est notre Petit Lapin à nous. S’il nous trahit, Miranda et moi, on fera une croix sur notre végétarisme le temps de lui mettre un petit coup derrière les oreilles et de le dépouiller.

73 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout

26

25

24

Post: Blog2_Post
bottom of page